“Tous les feux sont au vert” déclare son directeur Gilles Pette. Si l’on cherche encore des exemples pour démontrer la force de la culture dans l’aménagement des territoires, on pourra se référer aisément à l’installation du Louvre à Lens et à sa puissance d’induction dans la création d’Euralens, cette “structure fédératrice de projets” qui rassemble pour un effort commun, collectivités territoriales, acteurs économiques, culturels et universitaires. Plusieurs grands cabinets d'urbanisme sont au travail et présenteront prochainement les grands principes d'aménagement qui vont faire de l’ancien bassin houiller un territoire du futur. La population perçoit ce changement d'image et d'échelle et fréquente assidûment la Maison du Projet qui a reçu 5000 visiteurs en quatre mois dont les remarques sont recueillies avec soin et aident les responsables à sentir le pouls de la population.
La structure administrative du Louvre–Lens va sans doute prendre la forme d'un EPCC avec un Directeur général scientifique proposé par le Louvre qui aura l'agrément de la Région, maître d'ouvrage, et un Administrateur Général. Le budget de fonctionnement annuel de cette entité est évalué à environ 15 M d'euros. La Région reçoit déjà plus de douze millions d’un mécénat dit de “construction” par les grandes entreprises, et va mettre en place un mécénat de fonctionnement plus traditionnel. Sur le chantier, Eiffage, l'entreprise de gros œuvre a achevé les fondations et planté ses 600 pieux et tout laisse à penser que le musée sera achevé et ouvrira fin 2012.
Les équipes de conception peuvent donc travailler dans la sérénité et sont arrivées à un principe de présentation muséographique équilibré entre la nécessaire médiation et la pleine présentation des œuvres, qui fait penser au parti choisi par le musée du Quai Branly pour le Pavillon des Sessions. Le travail scénographique est réalisé par Adrien Gardère et les simulations en 3D sont, paraît–il, “extraordinaires”. Il faut imaginer, dans cette Galerie du Temps, longue de 200 m, dans les transparences de l'architecture de SANAA, une histoire de l'art se déroulant sans rupture de 4000 ans avant JC jusqu'à 1850.
Que nous apporte le Louvre–Lens au delà du fait qu'il sera le premier musée HQE en France? On admirera certainement son architecture à la transparence sereine, et la présentation nouvelle de ses collections suscitera peut–être des rapprochements étourdissants à la manière de Malraux. Mais il semble que l'innovation la plus radicale, que nous ne pouvons pas encore apprécier, se trouvera dans les nouvelles procédures de médiation, alliance de la scénographie et des nouvelles technologies apportées par la société On–situ. Elles permettraient aux publics “de participer à l'élaboration de la connaissance, dans une dynamique de compréhension” qui passionne les chercheurs et les laboratoires pour ces expérimentations nouvelles.
Nous avions commencé par re–situer le Louvre dans l’identité nouvelle d’Euralens. Il n’est donc pas illégitime de replacer la relation originale des publics avec l'art comme l’une des composantes “créatives” de la dynamique des territoires.
Enfanté au terme d'une gésine interminable – d'une quinzaine d'années – qui a eu raison de Michel Colardelle, son premier directeur, le Mucem semble enfin sur ses rails. Le choix de Marseille Capitale européenne de la culture en 2013 lui a donné le coup de pouce décisif. Mais il a aussi aidé à la désignation de la ville. Il faut maintenant se lancer dans une course de vitesse, qui n'est pas gagnée, pour pouvoir ouvrir effectivement en 2013. Elle appartient à Bruno Suzzarelli, son nouveau directeur.
On en parle assez peu mais le Mucem prend place dans une opération d'urbanisme majeure, Euroméditérannée, absolument décisive pour l'image et le développement de la ville qui prend en charge la quasi totalité du port. Il voisinera ainsi avec de grands équipements comme le Centre Régional de la Méditerranée, des commerces, des événements une grande place urbaine.
Le Mucem en est le pôle culturel. Il est composé de trois parties, le Fort Saint-Jean, monument historique du XIIème siècle et le Môle J4 sur lequel est en cours de construction le bâtiment de Ricciotti, relié au fort par une passerelle. Il a l'élégance que lui donne sa résille de béton fibré donnant à la façade l'aspect d'une fine dentelle. Il offrira deux plateaux d'exposition, un auditorium de quatre cents places, des espaces pour enfants, une librairie, une cafétéria et un restaurant sur le toit. Les collections seront rassemblées et traitées dans un troisième bâtiment, près de friches de la Belle de Mai, conçu par Corinne Vezzoni. Il pourra être ouvert au public.
Les collections viennent du Musée des Arts et Traditions populaires. L'ambition du Mucem est de traiter les grandes questions de société, de religion, de géopolitique, d'être un musée des civilisations du XXIème siècle centré sur la Méditerranée plus que sur l'Europe, comme la composition de son conseil d'administration le laisse penser.
Dans ce melting pot méditerranéen effervescent qu’est Marseille, il faudra faire preuve de beaucoup de talent et d’imagination pour gagner l’adhésion des publics. Les deux expositions inaugurales sont “Le Noir et le Bleu–Un rêve méditerranéen” et “Féminin–Masculin- Au bazar du genre” dont les appels d’offre seront lancés prochainement. Elles seront déterminantes pour donner aux publics non traditionnels l’envie d’adhérer et de créer, par exemple, “le club des supporters du Mucem”. Une première pour un musée.
Enfin ! En septembre, non seulement on les verra, les grues de Vinci, mais elles seront à l'œuvre. Et, avant la fin de cette année 2010, les premiers éléments de superstructure seront visibles attestant que le musée des Confluences n'est pas un vain projet d'architecture utopique mais une belle réalité concrète. Il était temps qu’elle apparaisse après un arrêt du chantier de près de 18 mois. Humour noir, c'est le moment que choisit Michel Côté, son inventeur et directeur, pour annoncer son départ après dix ans et son retour au Québec où il prendra la direction d'un établissement culturel.
Le nouveau directeur, en principe celui qui ouvrira le musée à la fin 2013, va prendre livraison d'une sorte de musée virtuel déjà très structuré, actif, producteur d'expositions, de principes et de théories, déjà dôté de ses trois Expositions de Synthèse et de Référence qui structurent l'ensemble des contenus et des principes de fonctionnement du musée : “D'Où venons-nous ?” scénographie de Klapisch-Claisse, “Qui sommes-nous ?” de Zand Co, “Que faisons-nous ?” de Dumas et Massenet.
Les collections présentées émanent du musée, avec des prêts de longue durée, augmentées de toutes les ressources des nouvelles technologies qui, en principe, permettront à ces expositions de ne pas vieillir. Il faudra donc imaginer un nouveau directeur qui intellectuellement devra se couler dans la forte empreinte laissée derrière lui par Michel Côté et ses méthodes de travail sans renoncer à apporter une touche personnelle non destructrice. Naturellement, dans ce musée des sciences et des civilisations qui ausculte en permanence l'air du temps, la relation avec les publics est déterminante. Le pôle de médiation sera donc très fort avec une équipe de “médiation volante” initiant en permanence des dialogues avec les visiteurs sur un mode non pédagogique.
Volet indispensable du fonctionnement, le mécénat et le sponsoring ont souffert du manque de visibilité du musée, de ses retards. Néanmoins, l'excellent accueil qui avait été réservé au projet sera assez facilement réactivé par un Comité de Campagne prestigieux et stable qui n'a pas désarmé. Une nouvelle étape s'ouvre donc pour le Musée des Confluences que sa robuste assise intellectuelle lui permettra, sans doute, de franchir sans encombre.
Ouverture prévue 2010
Coût initial 153 M€
Lors de sa présentation au SimeSitem, une vraie première, malgré les propos optimistes et volontaristes de Ludovic Mouly, Président de la Communauté d'Agglomération du Grand Rodez, une sourde inquiétude régnait sur le lancement du chantier.
Ces angoisses récurrentes ne se sont pas entièrement dissipées et reviennent périodiquement sous la forme “Soulages, l’enfant du pays, n’est-il pas trop grand pour une Agglomération de 55.000 habitants”? Elles continueront sans doute de hanter les nuits des édiles aveyronnais dont le goût pour l'économie n'est pas surfait. Aussi le choix de Benoît Decron comme conservateur et directeur est une bonne idée. Venu du musée de l’Abbaye Saint–Croix des Sables d’Olonne qu’il dirigeait, responsable de la collection Gaston Chaissac, très bon connaisseur de l’art contemporain, son enthousiasme, sa volonté, son goût pour l'architecture et ses bonnes relations avec Soulages, en font l'homme de la situation. Les premiers travaux de démolition précédant l’ouverture du chantier commenceront en septembre 2010 et permettront le début des travaux du musée en janvier 2011. Ils se termineront fin 2012 pour une ouverture pour l'été 2013. Le budget prévu est de 21,50 M d'euros.
Il faut donc s'organiser, construire une structure juridique claire et responsable (EPCC?) qui engloberait le musée Fenaille et sa belle collection de menhirs. Le budget de fonctionnement des deux musées mutualisés tournerait autour de 2 millions d’euros annuels.
Decron commence à constituer son équipe dans laquelle médiateurs, responsables des publics et de la communication sous toutes ses formes tiendront une place éminente et nécessaire, car tout comme Soulages, il n'envisage pas un mausolée mais un espace vivant où les œuvres tournent et méritent un contexte explicité. Cet espace sera d'autant plus vivant que les services des musées, aujourd'hui essentiels, comme boutique et restaurant, seront intelligemment traités. Le Grand Rodez a lancé un appel d'offres pour son restaurant auquel Michel Bras, le restaurateur trois étoiles de Laguiole, un des plus célèbres cuisiniers du monde, a répondu. On connaît son sens de l'innovation. Nul doute que ses propositions feraient date. Une sorte d'“art culinaire” au Musée, pour toutes les bourses. Le musée Soulages pourrait donc annoncer, sans risque de se tromper, qu'il a le meilleur restaurant de musée au monde. Il accompagnerait dignement l'exposition internationale d'ouverture, “Les amis de Soulages”.